--------Léon Verdon (1871-1916)-------non "Mort pour la France" !

"La trop grande accumulation de mélinite ce jour-là (200 tonnes), la présence de lots impurs (que la poudrerie d'Angoulême a refusés parce qu'ils étaient trop chargés en acide sulfurique) et l'élévation de la température due à l'incendie, ont eu des conséquences malencontreuses sur ce produit hautement sensible et dangereux."

"Dans l'usine, la surveillance n'existait pas ou elle était illusoire. Beaucoup fumaient en dehors ou dedans."

Impression de déjà vu, de déjà lu. Impression que ces lignes concernent l'explosion de Beyrouth, le 4 août 2020. Non... Bruno Baverel écrit ces lignes en 2019. Il fait le récit de l'explosion de la poudrerie Vandier, à La Rochelle, le 1er mai 1916.

Une accumulation de produits dangereux et instables. Une surveillance pour le moins défaillante. Un début d'incendie. Les pompiers et les premiers volontaires qui se précipitent… Et l'explosion. 177 morts, plus de 500 blessés, et partout la destruction, la désolation. Du déjà vu... Du déjà lu...

Et au milieu de ce chaos, tu es là, Léon. As-tu compris ce qu'il se passait ? As-tu été tué sur le coup ou blessé ? Est-ce une consolation : tu fais partie des hommes dont on a retrouvé le corps et qui ont pu être identifiés. Tu es là, c'est certain. Tu étais là.

En pleine bataille de Verdun, tu es à 700 km du front. Par trois fois alors que tu avais 21 puis 22 puis 23 ans, l'armée n'a pas voulu de toi. Motif : "Faiblesse". Sans doute en raison de ta taille : tu mesures 1m54. Trop petit pour servir dans l'armée, pour manipuler les armes. Alors, on te laisse tranquille et tu n'es pas incorporé. En 1897, tu épouses Madeleine, et en 1903 naît ton fils Marcel. Vous habitez à Sainte-Soulle (Charente-Maritime). Tu es cultivateur, comme l'a été Jean, ton père, et comme le sera Marcel, ton fils. L'Armée se rappelle à toi, de temps en temps, sans plus. Le 1er août 1914,  tu es mobilisé. Mais tu restes "dans le service auxiliaire". Tu ne pars pas au front. Le 25 janvier 1916, tu as alors 44 ans, tu es "détaché à l"usine Vandier", qui fabrique des produits explosifs. L'usine a été construite sur le Port de La Pallice, à La Rochelle, à une vingtaine de kilomètres de chez toi. Comme toi d'autres soldats y travaillent, au milieu des civils. Ce n'est pas le front, mais c'est aussi une façon de se battre pour son pays. D'aider, dans la mesure de ses moyens, à l'effort de guerre.

Tu fais partie des 177 morts. Mais, comme tes autres camarades soldats, tu ne seras pas reconnu "Mort pour la France". Non, juste "décédé par accident". Pour toi, cela ne change pas grand-chose. Mais cela m'attriste.

Toi et les autres victimes, vous aurez de grandes funérailles. Des personnalités se déplaceront. Un monument en votre souvenir sera construit. Ton nom y figure. Cent ans après l'explosion, une commémoration a eu lieu. On s'est souvenu de vous. On s'est rappelé ce qui fut une grande tragédie, pour ceux qui sont morts, mais aussi pour leurs familles. 

Léon, penses-tu qu'un jour les hommes apprendront de leur folie ?

L'Echo saintongeais, 7 mai 1916, page 2

[ Clic sur l'article pour le lire dans le journal, sur le site Retronews]

Le monument, au cimetière de La Rossignolette, avec ton nom :

Léon Verdon est un ascendant de Début-Branche Verdon : son Sosa n° 16, Génération V

La fiche généalogique de Léon, sur mon arbre Geneanet :

Une page consacrée à l'explosion et deux reportages de FR3 (avec une vidéo dans le premier reportage), lors de la commémoration de 2016 (vous y retrouverez également les photos ci-dessus) :

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